
Il y a quelques jours je discutais avec une ami. Nous parlions du soleil, du ciel bleu, bref, de l’été qui arrivait enfin dans notre belle région du sud de la France. Le genre de conversation durant laquelle des dizaines d’évidences sont sorties à la minute. Le cerveau en roue libre alors même que le Tour de France n’était pas encore de la partie.
Mais quelques mots m’ont soudain tiré de ma torpeur pré-estivale :
Il ne faut pas se leurrer : les gens vont là où c’est beau !
Cette phrase est on ne peut plus fausse. Mais elle fait partie des idées ancrées dans la tête du consommateur français, bien plus que dans celle de la plupart de ses homologues étrangers d’ailleurs.
Elle relève pourtant du bon sens et c’est précisément pour cela qu’il est difficile de comprendre qu’elle est erronée.
« Si un produit est bon, ça se sait et il se vend. »
Il ne s’agit pas de dire que les gens vont là où c’est moche, mais bien de comprendre que la « qualité intrinsèque » de l’endroit en question n’est qu’un élément parmi d’autres.
En fait, il est même très secondaire.
Ici on peut se dire que la notion de beauté est suggestive, ce qui pourrait expliquer que tout le monde ne se rend pas au même endroit. Ce serait se mentir : bien entendu, il peut être difficile de choisir Miss France parmi les dix finalistes mais cela ne veut pas dire que celles-ci ont atteint cette place par hasard. Gageons que si l’une d’entre elle était opposée à Josiane Balasko, le résultat de l’élection laisserait peu de place à l’incertitude.
Ce qui est très étonnant c’est que cette croyance quant au caractère décisif de la qualité d’un produit (ou d’un service) est profondément ancrée chez les Français, bien plus que leurs voisins occidentaux. Elle explique d’ailleurs pour une large part les difficultés rencontrées par le pays au début du XXème siècle.
La qualité intrinsèque et objective, cela existe ?
Nous ne sommes évidemment pas tous sensibles aux même critères. Certains aiment la pluie, d’autres le grand soleil. Et beaucoup aiment les deux, selon l’humeur du moment. Mais ce n’est pas le centre du débat.
Pour s’en convaincre, il suffit de s’intéresser à des éléments concrets, c’est-à-dire chiffrables. Et on s’aperçoit rapidement, pour ceux qui en doutaient dans une époque où tout le monde mérite une mention Très Bien au Bac ;-), que la qualité intrinsèque d’un produit existe. Il faut comprendre par là qu’il est possible de montrer de nombreux exemples d’un produit qui présente en tout point des caractéristiques supérieures à un autre et qui, pour autant, se vend moins bien. Voire pas du tout.
C’est donc bien que cette fameuse qualité ne peut aucunement suffire à expliquer le succès du rival (cf le bien connu cas marketing Apple).
Un élément du mix marketing parmi d’autres
Quelques réflexions rapides permettent de le comprendre. Si vous fabriquez dans votre cave un produit révolutionnaire, que vous êtes capable de le produire en série et que vous êtes prêt à l’offrir à quiconque en fera la demande, mais que vous ne sortez jamais de chez vous car vous êtes occupé à le fabriquer ou que vous êtes agoraphobe, que croyez-vous qu’il se passera ? Hé bien le consommateur français croit généralement – plus ou moins consciemment – que « ça va vite se savoir » et qu’une file d’attente interminable va rapidement se former devant chez vous !
Certains font heureusement exception, comme j’ai pu le voir récemment sur Facebook :
Hé oui, le « no parking no business » qui a fait la richesse de biens des gens reste complètement obscur dans notre pays. Il met pourtant en évidence un élément crucial : les éléments « pratiques » qui entourent le produit en lui-même sont presque toujours plus importants que celui-ci.
Un peu comme cette jeune étudiante qui me disait aimer les films en VO et se rendait chaque semaine dans son multiplex voir des films en VF car elle y était « bien assise » et qu’il « faisait bon dans la salle ».
Mais il manque encore quelque chose…
Importance de la perception
Hé oui… En marketing comme en politique, ce n’est pas la qualité intrinsèque d’un produit ou d’un programme qui fait la différence, mais bien la perception que le consommateur ou le citoyen en a. D’où l’importance de la communication en général et la nécessité de s’assurer que son positionnement est le bon et qu’il est bien exprimé.
Vous n’êtes pas convaincu ? En cette période de soldes, une petite illustration vaut sans doute mieux que mille mots :