« Ne pas prendre les gens pour des cons, mais ne jamais oublier qu’ils le sont. »
Qui ne connaît pas cette formule lapidaire ? Qui ne l’a jamais entendue lors d’une de ces « conversations PMU » dans la bouche d’un antipub ?
Prendre les gens pour des cons serait en effet, d’après certains, le lot commun du publicitaire. Cette phrase dénoncerait ainsi le cynisme de ces professionnels de la communication qui seraient payés par les annonceurs pour manipuler et exploiter leur cible. Le tout en prenant soin que l’abrutissement de la population ne se remarque pas trop. Il ne s’agirait pas que l’utilisation du fameux « temps de cerveau humain disponible » de Patrick Le Lay se déroule de manière trop ostensible !
Une sorte de fascisme économique dans un écrin de velours.
Comme bien souvent, l’erreur de raisonnement, si tant est qu’il y en ait un, vient d’une incompréhension fondamentale de la phrase ainsi répétée jusqu’à la nausée.
Il faut prendre les gens pour des cons. Car ils le sont. Car nous le sommes tous.
En réalité, nous sommes tous stupides. Si l’on est observé par quelqu’un qui a du recul et des connaissances.
Du côté des anti-américains primaires on entend ainsi que les Américains – pardon, les Etats-uniens –, seraient des abrutis sous prétexte qu’ils ne connaîtraient rien à la géopolitique mondiale et seraient centrés sur leur pays. Allons donc. Le Français moyen est-il plus au courant de ce qui se passe en Bolivie, en Chine ou même en Grèce ou en Espagne ? Le Français moyen sait-il mieux situer sur la carte Chicago, Djakarta ou même Limoges ou Dijon ?
Nous sommes tous stupides. Ceux qui n’en ont pas conscience le sont simplement un peu plus que les autres.
Prendre les gens pour des cons, soit. Mais intelligemment.
En matière de communication sur internet, accepter ce constat permet de s’éviter bien des tracas. Durant ma carrière de responsable webmarketing, j’ai ainsi eu la (désagréable) surprise d’arriver au sein d’une agence en même temps qu’un grand nombre de stagiaires et de salariés qui occupaient leur tout premier poste. Par-dessus le marché, il a fallu composer avec un manque criant – voire une absence totale – d’encadrement, de structure, de process, de formation, de connaissance du métier, …
Dans ce contexte, il était inévitable que je me retrouve rapidement confronté à des phrases du type :
Les gens sont pas stupides, ils savent bien où il faut cliquer !
A vrai dire, il y en eut beaucoup d’autres, sur lesquelles j’aurai peut-être l’occasion de revenir : « Le marketing ne sert à rien », « Facebook est mort, Google Plus l’a tué », « Personne ne lit les newsletters », « Le référencement ça n’existe pas, il faut juste coder proprement », etc. Avouez-le, il y a de la matière 😉
Mais revenons à notre sujet du jour.
Vous avez un site web ? Sans trop me tromper, je peux affirmer que vous vous rendez dessus pratiquement tous les jours. Vous connaissez par cœur votre marque, vos produits, vos valeurs, vos qualités et défauts. Du moins, je vous le souhaite ! Mais qu’en est-il de l’individu lambda qui vient de découvrir une page de votre site web au détour d’une recherche sur Google ou d’un lien posté sur Facebook ?
Prendre les gens pour des cons, c’est d’abord les connaître.
Il arrive avec sa personnalité et sa connaissance du média, de votre marque et de vos produits. Il se peut qu’il ne vous connaisse pas du tout. Qu’il ait des idées préconçues sur vous. Ou qu’il fasse ses premiers pas sur internet. La vérité est que vous n’en savez rien. Il y a fort à parier, en tout cas, que la vie de cette personne ne gravite pas autour du net. A moins d’être l’auteur d’un blog dédié aux geeks ou à la communication en ligne. Et encore…
C’est aussi – et surtout – les respecter.
Si votre visiteur ne trouve pas ce qu’il est venu chercher dans les secondes qui suivent son arrivée sur votre site, il va partir sans demander son reste. Votre taux de rebond sera alors très élevé. Comment faire alors ? En vous mettant à sa place : quelqu’un qui ne sait pas, qui ne connaît pas, qui découvre. Il faut clairement lui montrer le chemin.
C’est bien pour cela qu’il faut également respecter les usages et bonnes pratiques du web, par exemple pour l’emplacement du bouton « Contact » ou la forme de la boîte de recherche. Plus exactement : si vous ne les respectez pas, il faut que cela soit fait en conscience et en sachant les problèmes que cela va entraîner, et non que ce soit dû à un manque de connaissances !
De même, si vous ne mettez pas en évidence ce que vous attendez de votre visiteur, notamment (mais pas exclusivement) via un call-to-action, attendez-vous à observer un taux de transformation fort peu élevé.
Logique ? Bien entendu, mais pourquoi ces évidences doivent-elles être encore si souvent rappelées ? Parce que bien trop de sites web refusent de respecter les internautes !
Comme je le rappelle dans la formation marketing relationnel que je donne pour le compte de l’EMWeb, une relation-client saine et pérenne se bâtit autour de la confiance et du respect (si la question vous intéresse, je vous invite à jeter un oeil aux travaux de Seth Godin, qui ont grandement contribué à une prise de conscience en la matière).
Prendre les gens pour des cons, et ne jamais oublier que vous l’êtes !
Si vous respectez vos clients, vos prospects, les gens en général, comprenez donc bien le sens de la formule « Il ne faut pas prendre les gens pour des cons, mais ne jamais oublier qu’ils le sont« . Elle signifie tout simplement que vous n’êtes pas plus intelligent qu’eux.
Ne l’oubliez jamais.
Crédit photo Prendre les gens pour des cons : Kick Photo